Les fleurs ont toujours été une source d’inspiration pour les artistes. Dans les natures mortes, elles permettent la recherche de la précision ou, au contraire, de donner libre cours à la créativté.
Par Christian Charreyre
Osias Beert, dit l’Ancien, peintre flamand, a joué un rôle important dans le développement initial des natures mortes de fleurs en Flandres et en Hollande. «Ces compositions de fleurs n’ont certainement pas été présentées par les peintres d’alors comme des images fidèles de la réalité. Il s’agit bien de mises en scène élaborées avec une recherche patiente et même minutieuse. Ajoutons qu’elles étaient inconcevables dans ces pays nordiques où les jardins d’agrément étaient rares, les fleurs précieuses et inaccessibles, au même titre que de véritables objets de collection», explique Michèle Perny, chargée de recherche documentaire au Musée du Louvre. Le bouquet peint par Osias Beert, dans son tableau Corbeille de fleurs, qui ignore les lois de la pesanteur, de la nature et l’ordre des saisons, n’a pu exister que dans l’imagination de l’artiste. «Il n’est que constructions et reconstitutions harmonieuses, géniales de raretés, étudiées d’après nature, ou copiées également d’après des illustrations de livres botaniques avec une précision toujours plus exacerbée». Ce qui rend encore plus étonnante la rigueur de la représentation, digne d’un ouvrage de botanique.
Dans la carrière de Delacroix, on ne compte qu’une dizaine de natures mortes, le genre n’étant pas très réputé en France à son époque. Mais son intérêt pour ce sujet est notable tout au long de sa carrière, notamment lors de son voyage au Maroc en 1832, où il est frappé par la profusion d’espèces et de couleurs. C’est lors de ses séjours à Nohant vers 1843, chez Georges Sand, que l’artiste s’intéresse plus particulièrement à l’étude des fleurs. Au-delà d’un goût pour l’imitation et la botanique, il développe une esthétique flamboyante, déclarant à son ami le peintre Constant Dutilleux : «J’ai essayé de faire des morceaux de nature». Dans Corbeille de fleurs, on trouve pêle-mêle des marguerites, des coquelicots, des giroflées, des hortensias, des roses et du lilas. Ce sont essentiellement des fleurs de printemps ou d’été, qu’il arrange de manière à créer une impression de jaillissement. L’occasion pour le peintre de jouer sur les variations de couleurs mais aussi de textures. Delacroix a placé sa corbeille devant un fond neutre, de couleur ocre, de façon à mettre en valeur les nuances. Ce n’est pas ici le détail qui est important, mais la vision d’ensemble.