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Dossiers

La Danse au Moulin-Rouge

Cette toile d’Henri de Toulouse-Lautrec est l’œuvre la plus emblématique de ce peintre impressionniste mondialement célèbre. Sa popularité est également due à son adaptation sous forme d’affiches diffusées à plusieurs milliers
d’exemplaires.

À peu près à la même époque où Degas peignait les petits rats de l’Opéra, à quelques centaines de mètres des appartements haussmanniens, le jeune Henri de Toulouse-Lautrec passait ses soirées et ses nuits dans les cabarets à dessiner les danseurs – et surtout les danseuses – du Moulin Rouge, qu’il reproduisait ensuite sur toile. Tout comme son inspirateur Edgar Degas, il est fasciné par le mouvement de ces corps alertes, éveillant certainement quelques désirs sensuels en lui. Très jeune, Lautrec tentait déjà de capturer le mouvement en dessinant des courses de chevaux notamment.

Composition audacieuse
La toile représente une scène de danse typique du Moulin-Rouge, réunissant Valentin le Désossé (Jules Renaudin de son vrai nom) et une danseuse de cancan en habit de ville, et non pas avec les froufrous des danseuses professionnelles. En levant sa jambe, elle découvre ses mollets, une audace pour l’époque. Elle porte un jupon dont la transparence et la matière sont reproduites par de simples coups de brosses blancs, qui indiquent le plissé de la pièce de tissu. Ses pieds sont chaussés de bottines en cuir assez hautes, indispensables pour protéger les chevilles dans cette danse voltigeante.

Satire sociale
Volontairement, Lautrec tranche sa composition en y incorporant une bourgeoise à la robe rose qui ne jette pas un seul regard aux danseurs. Cette rupture entre le monde douteux de la nuit et la respectabilité de la grande bourgeoisie se retrouve ici mélangés et confrontés. Certains hommes observent la jeune femme d’un œil concupiscent. À l’arrière-plan, parmi la foule d’hommes en haut-de-forme, on reconnaît le propriétaire du Moulin-Rouge et peut-être le père de Toulouse-Lautrec (le vieil homme avec une barbe blanche). L’homme très grand serait le cousin de Lautrec, Gabriel Tapier de Seleiran.

La force des opposés
Pour rendre sa toile étonnamment dynamique, Toulouse-Lautrec joue sur les contrants. Entre le couple qui danse au milieu du parquet, observé avec envie ou indifférence par le public statique autour de lui, mais aussi par la différence entre les deux acteurs principaux. Valentin est presque immobile, avec une pose réservée qui tranche avec l’amplitude des gestes de sa partenaire, amplifiés par le jeu des ombres sur le parquet. Au sens littéral, elle occupe toute la scène, alors qu’elle ne représente qu’une petite partie de la toile. Cette sensation est accentuée par le grand espace laissé libre devant elle à l’avant-plan.

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